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La dernière danse d'Emperor Faith...


Mikey Faith (à droite sur la photo), mythique opérateur du non moins mythique Emperor Faith sound system vient de s'éteindre à Kingston, en Jamaïque. Avec lui, c'est tout un pan de l'histoire musicale de la Jamaïque qui disparaît.

Mikey n'était pas un "sufferer" de West Kingston. Né dans les années 40, il grandit au sein d'une famille de la middle class qui l'envoie finir ses études aux States. Rapidement, il s'intègre dans la vie professionnelle jamaïcaine et gagne confortablement sa vie. Mais tous les midis, il quitte les beaux quartiers pour rejoindre celui, miséreux, de Trench Town. Ce qu'il recherche ? La meilleure marijuana possible, qu'il trouve chez Mortimer Planno, le mentor rasta des Wailers. Il croise alors la route de Peter Tosh, de Bunny Wailer puis de Bob Marley, dont il devient un proche. Il les laisse passer leurs coups de fil de chez lui, les trimballe en voiture, et produit parfois quelques projets, comme la session d'enregistrement de... Trench Town Rock ! Lorsque Bob lui demande, au tournant des années 70, de devenir son manager, il commet ce qu'il appelait "la plus grosse erreur de ma vie"... il refuse. Car il vient de racheter un petit sound system à un ami, qui devient bientôt Emperor Faith.

Mikey Faith devient un "dub man". A longueur de temps, il se rend dans les studios de la capitale pour obtenir les meilleurs dubs du moment. Il passe notamment des heures chez King Tubby : "J’étais devenu un « Little Tubby ». Je lui lâchais tellement de fric pour mon matos, des « dubs »—je lui achetais toutes les semaines ! Quand je passais la porte du studio, il était toujours content de me voir arriver. L’argent arrivait (rires)." Mikey l'a toujours dit, pour avoir un bon sound, il faut lâcher du fric. Rapidement, tandis que les autres sound systems accumulent les piles de 45 Tours, Emperor Faith accumule les piles de dub plates ! Ce sont des mix uniques de morceaux, achetés à prix d'or auprès des producteurs, et remixés pour l'occasion. Ceux qui feront la gloire d'Emperor Faith sont ceux obtenus à Studio One, dont il devient le spécialiste. Il leur doit son plus beau souvenir de "dub man", sa victoire sur le sound de King Tubby, en 1975, qu'il "tue" dans la National Arena en 1975 grâce à un dub devenu culte depuis, le Death In The Arena.

Death in the Arena, le dub avec lequel Emperor Faith tue le Tubby's Hi-Fi en 1975.

En 2018, après plusieurs décennies de silence, Emperor Faith reprenait du service en Jamaïque. J'eus la chance d'assister à la soirée, du côté de Saint Thomas. Je me souviendrai toute ma vie du dub impressionnant du Drifter (Dennis Walks) joué ce soir-là, sous le ciel nocturne de la Jamaïque. Ainsi que de ma rencontre avec Mikey, chez lui, un peu plus tard. Cet homme, à 70 ans passés, pouvait parler musique pendant des heures avec l'enthousiasme d'un adolescent. Et les histoires qu'il racontait concernaient U Roy, Bunny Lee, Bob Marley, Lee Perry, King Tubby, Coxsone... On l'aurait écouté toute la nuit.

Que Mikey Faith repose en paix, donc. Il ne reste de son épopée sonore qu'un mythe dont on perçoit encore, faiblement, le reverb. L'un des sound systems les plus mythiques, vient de donner sa dernière danse. L'empereur est mort, vive Emperor Faith !

Nous avons publié, à l'époque, deux ARTICLES sur la résurrection d'Emperor Faith, et avons même failli faire venir Mikey Faith en Europe. Malheureusement, la vie en a décidé autrement.

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