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Cartouche - Le Craqueur, assassin !

Suite à notre dernier article sur les ARREST DE LA COUR DE PARLEMENT relatifs aux condamnations des soi-disant complices de Loüis-Dominique Cartouche, une lectrice nous faisait remarquer la violence des punitions infligées aux coupables (elle plaignait surtout les innocents qui, à coup sûr, auront figuré parmi cette longue liste de condamnés). L'époque était rude, la relation des gens à la douleur, la souffrance et la mort, sans doute bien différente que la nôtre aussi. Et il y allait sans doute de la crédibilité de la justice, alors bien moins organisée qu'aujourd'hui.


Certes, soumettre à la question, ou torture, même les condamnés à mort peut choquer. C'était un moyen d'obtenir des informations sur des crimes ignorés même si peu de gens n'avoueraient pas avoir tué père et mère après avoir avalé 6 litres d'eau, ou souffert le supplice des brodequins (à l'issu duquel, les jambes broyées, Cartouche n'avait toujours pas parlé !). D'autres, en revanche, avouèrent des crimes irrésolus. Ce fut le cas de Jean-Baptiste François Crozy, plus connu sous le terrible surnom de Le Chevalier le Craqueur.


Convaincu d'assassinat, de vol avec effraction, de port d'armes et de vols dans les maisons royales, il fut condamné, par l'arrêt du 9 juin 1722, à avoir les jambes, cuisses, bras & reins rompus vif sur l'échafaud. Ce fait, stipule l'ARREST, son corps mis sur une roue, la face tournée vers le Ciel pour y finir ses jours. Mais le même écrit ordonne qu'il soit soumis à la question au préalable. C'est lors de cette séance que le scélérat avoua notamment un crime célèbre à l'époque, celui de Jacques Vergier (1637-1720). Poète à ses heures, mondain libertin à d'autres, il avait une voluptueuse nonchalance quil'empêcha de monter à de plus hauts emplois et lui fit même négliger d'amasser de grands biens, souligne le Dictionnaire historique de Chaudon (Lyon, 1804). Il vivait une vie libre et tranquille lorsqu'il fut assassiné d'un coup de pistolet dans la rue du Bout-du-Monde à Paris, sur le minuit, en revenant souper de chez un de ses amis : c'était le 23 août 1720. L'infortuné croisa en effet la route du Chevalier Craqueur et de deux de ses complices, tous camarades du fameux Cartouche. Chaudon explique ensuite: Son dessein était de voler Vergier; mais il en fut empêché par un carrosse. Dans un article édifiant, Patrice Peveri écrit : Pris de panique et de fureur face à une victime réagissant à la menace, les voleurs la tuèrent et, affolés par les appels au guet lancés par les voisins accourus aux fenêtres, prirent la fuite sans avoir eu le temps de lui dérober le moindre objet. L'article du dictionnaire rappelle la fin violente de l'assassin, rompu le 10 juin 1722 à Paris, ajoutant c'est donc sans fondement qu'on a attribué cette mort à un Prince qui voulait se venger d'une satire que le poète avait enfantée contre lui. Intéressant.


Certains historiens estiment aujourd’hui que le mythe Cartouche, chef supposé d’une bande de 500 voleurs, fut monté de toutes pièces par la police de l’époque dans un but peu clair. On raconte d’ailleurs que le bandit aurait été lié à des gens puissants, dont le Régent en personne ! Ce dernier, grimé en marchand, ne rendit-il pas visite, dit-on, à Cartouche lorsqu’il était emprisonné au Châtelet ? Le filou aurait rendu des services au régent, dont, peut-être, l'élimination de Vergier ? Patrice Péveri retranscrit la version des faits consignée dans le journal de Buvat (qui lie l'assassinat à celui d'un autre auteur, lui aussi pamphlétaire) : On attribua (…) la parodie sur la dernière scène de Mithridate au sieur du Vergier, chevalier de l'ordre de Saint-Louis, qui logeait à l'hôtel de Coislin, rue Beaurepaire, âgé d'environ cinquante ans, lequel s'en retournant chez lui, dix jours auparavant, à onze heures du soir, avait été suivi depuis le Palais-Royal, d'où il sortait, par un assassin qui l'ayant joint dans la rue du Bout-du-Monde, au delà de l'égout, lui dit : « C'est donc toi, du Vergier le magnifique !» Et en même temps il lui tira un coup de pistolet, et comme ce gentilhomme palpitait encore, l'assassin acheva de le tuer de plusieurs coups de baïonnette, et se sauva. Le Guet étant survenu, on porta le corps à la morgue du Châtelet, tout habillé d'un drap musc avec un galon d'or large de trois doigts et une veste de brocard d'or. Le lendemain, ayant été reconnu, ses héritiers le firent retirer et inhumer pompeusement à Saint-Sauveur, sa Paroisse. Ils firent aussi faire des informations par un commissaire du Châtelet, qui prit le nom des habitants de la rue du Bout-du-Monde qui avaient ouï faire le meurtre, plusieurs ayant mis la tête à la fenêtre au bruit du coup de pistolet, et les fit assigner pour déposer ce qu'ils en savaient. Cependant l'affaire en demeura là, par un ordre supérieur.


Les aveux du Chevalier le Craqueur, torturé, rompu, crevé, auraient donc servi d'alibi à un meurtre d'état ? Les théories du complot ne datent pas d'hier.


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